Les passagers de Flying-V prennent place dans les ailes

Au cours de ces deux dernières années, la Technische Universiteit (TU) Delft a réalisé avec Airbus huit vols d’essai avec une maquette du Flying-V, un avion de ligne futuriste à plus d’un titre.

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( Photo: TU Delft )

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ENGINEERINGNET.BE - «Lors des vols d’essai, nous avons pu démontrer que l’avion est stable et parfaitement pilotable », explique le chercheur et chef de projet Roelof Vos de la faculté de génie aérospatial.

« Nous avons laissé des pilotes le piloter dans un simulateur de vol. « Nous avons appris que les caractéristiques de vol sont comparables à celles d’un avion traditionnel, mais qu’il fallait aussi plus de force à l’avion pour la rotation autour de son axe vertical. »

Optimiser le concept  
L’Allemand Justus Benad a développé l’idée de base du Flying-V en 2013, lors de son travail de fin d’études à la TU Berlin. Lors de son stage chez Airbus Hamburg, il a intégré la cabine de passagers, le pont de fret et les réservoirs de carburant dans les ailes de l’avion. Il a aussi construit une maquette en mousse de polystyrène. Plus tard, il est allé travailler à la TU Delft en tant que chercheur postdoc où il a pu entièrement se consacrer au Flying-V.

« Justus Benad a publié en 2015 un article sur le concept et l’a breveté. Notre faculté travaille dessus depuis 2016. Nous avons uniquement apporté des modifications au concept et amélioré le profil aérodynamique. Avec Airbus, nous avons optimisé la construction de l’appareil et identifié les caractéristiques de vol. Depuis 2019, nous travaillons avec KLM.

Les connaissances de cette compagnie aérienne en matière de maintenance, d’opération au sol et de conception de cabine ont été très utiles lors de la conception de la cabine et de l’intégration du moteur dans l’avion. Et l’enthousiasme des collaborateurs de KLM envers cet avion durable fut une motivation supplémentaire. »

Les premiers vols commerciaux sont attendus à partir de 2040. (photo TU Delft)

Utilisation de l’infrastructure existante   
Le Flying V est plus court de 55 m que l’Airbus A350 mais a la même envergure (65 m). Une fois opérationnel, il pourra utiliser les infrastructures aéroportuaires existantes comme les portes d’embarquement et les voies de circulation. Il transportera pratiquement le même nombre de passagers (314 dans une configuration standard) et la même quantité de fret (160 m³).

La maquette de l’avion a une largeur de 3 m. « Le Flying-V a une meilleure aérodynamique que l’A350 par rapport au volume, ce qui génère une moindre résistance à l’air. Le Flying-V peut donc parcourir la même distance en consommant 20% de carburant en moins. Les grandes winglets, les extrémités droites des ailes, optimisent la répartition de la portance, ce qui diminue encore la résistance. » La construction légère de l’appareil contribue à la réduction de la consommation.

« Nous y sommes parvenus en répartissant la charge utile sur toute l’envergure de l’avion. Pour les places assises normales, nous utilisons des sièges plus légers de 4 kg que les sièges d’aujourd’hui dans les avions de ligne long-courriers. Le professeur Peter Vink et le designer industriel Thomas Rotte de la TU Delft ont conçu une cabine de forme ovale. » La taille toujours très spacieuse de l’appareil, malgré son poids plus léger, évite qu’il ne devienne un jouet dans le vent.

Répartition structurelle  
Il n’y a pas que les matériaux structurels qui caractérisent l’intérieur. Les concepteurs se sont aussi penchés sur les panneaux de finition. « Ils ont travaillé sur l’optimisation de la topologie. Il s’agit d’une série de simulations informatiques servant à définir la meilleure répartition structurelle pour soutenir le poids des passagers. La suppression de matériel superflu a résulté en un concept plus léger mais aussi une utilisation plus économique des matières premières. Le siège offre plusieurs positions aux passagers pendant le vol. Ils peuvent s’assoir bien droit pour travailler sur leur laptop par exemple, ou utiliser l’espace pour se prélasser ou lire confortablement. » 

L’agencement coupé des sièges, avec deux rangées de deux sièges se faisant face, permet aux passagers de voyager en groupe, de converser et de manger ensemble. « La plupart des sièges sont disposés en cascade. Cela augmente l’espace aux bras et aux jambes et offre plus d’options au voyageur pour s’isoler. Comme la cabine, du fait de la forme aérodynamique du Flying-V, se trouve dans un angle par rapport au sens du vol, les sièges – de par leur configuration en cascade – se trouvent aussi dans le sens du vol. Les rangées de sièges suivent les lignes de la cabine. »

Roelof Vos, chef de projet: « Grâce à notre collaboration avec des partenaires comme Airbus et KLM, nous savons très bien comment fonctionne un avion dans la pratique quotidienne. »

Espace et confort  
Les étudiants de la TU Delft, Andrea Riccio, Janita Siriseth et Nard van der Werff, ont eu une idée originale pour l’ancrage des sièges. Dans leur configuration, les rangées de sièges sont fixées alternativement au sol et au plafond. « Cela crée de l’espace au-dessus et en-dessous des sièges. » Une étude a montré que 60% des passagers aiment dormir pendant les vols long-courriers mais pas pendant tout le vol.

« Le concept de literie du Flying-V se compose de trois couchages pouvant être convertis en un canapé trois places au décollage et à l’atterrissage pour des questions de sécurité. » Plusieurs études sont en cours sur les effets des versions de conception et les expériences des passagers. « Suivant cela, nous poursuivrons le développement des concepts. »

Encore du travail  
Grâce aux vols d’essai, de nombreuses améliorations ont pu être apportées au concept. Le centre de gravité de l’appareil a ainsi été déplacé plus vers l’arrière. Une nécessité car lors du premier vol d’essai, la maquette avait atterri trop lourdement sur la partie avant, qui s’était rompue. Dernièrement, la TU Delft a réalisé des essais en soufflerie avec des nouvelles gouvernes.

« Nous pensons avoir solutionné le problème de rotation autour de l’axe vertical », poursuit Vos. « Nos efforts de recherche actuels concernent divers aspects : l’intégration du moteur, le concept aérodynamique, le concept de construction, l’assistance en escale, la production sonore et l’intégration des réservoirs d’hydrogène. Il faut clarifier un certain nombre de choses dans tous ces domaines. » Il faudra patienter un certain temps avant de pouvoir acheter un billet pour un vol avec le Flying-V.

« Grâce à la collaboration avec des partenaires comme Airbus et KLM, nous savons parfaitement comment un avion fonctionne dans la pratique quotidienne. Nous exploitons toutes ces connaissances pour poursuivre le développement et affiner le concept. Mais il faut encore pas mal de recherche et de développement. Je pense qu’il faudra patienter jusqu’en 2040 avant que l’appareil ne soit introduit dans la pratique », estime Vos.