Côté à côte dans l’atelier, mais qui réalise quelles tâches?

L’intelligence artificielle est de plus en plus utilisée pour ajuster les stocks, afin d’accélérer les livraisons. Ce processus facilite la robotisation et la cobotisation. Les opérateurs se voient attribuer des nouveaux collègues et de nouvelles tâches.

Mots clés: #cobot, #distribution, #employeur, #supply chain

Lire plus

Vacatech

( Photo: 123RF )

ENGINEERINGNET.BE - Dans l’ensemble, les entreprises devraient déployer plus de 21% de robots mobiles autonomes (AMR) en plus par an d’ici à 2030. Selon l’étude d’Inkwoord, le type de robot qui connaît la croissance la plus rapide en Europe est le chariot élévateur autonome. Son usage devrait augmenter annuellement de 22,5% d’ici là.

Les drones des grands entrepôts arrivent en deuxième position avec 22,48%. Les grands magasins et les entreprises d’e-commerce en particulier s’intéressent aux robots volants sans pilote. Ils sont notamment déjà utilisés par IKEA. Les GTP (robots préparateurs de commandes) sont très populaires. Ils apportent les produits à l’opérateur. La part des GTP est actuellement supérieure à 44%. Les véhicules télécommandés sans pilote (UGV) sont en plein essor.

Ils prennent en charge les tâches dangereuses ou impossibles pour l’homme. À l’avenir, de nombreux travailleurs réaliseront leurs tâches avec un robot de taille humaine, ou cobot, à leurs côtés. Ce dernier effectuera les tâches répétitives, stressantes ou dangereuses pour l’homme qui pourra alors se concentrer sur un travail plus complexe ou créatif. L’installation de cobots a augmenté de 50% entre 2020 et 2021. Ils gagnent en popularité mais ils ne représentent que 7,5% de l’ensemble des installations de robots dans le monde.  

Une vision plus large de la sécurité 
« Les évolutions permettent aux robots - désormais appelés robots collaboratifs ou cobots - de sortir progressivement de leur cage de sécurité pour travailler avec l’homme », déclare Nicole Berx, chercheuse doctorante au Département de Génie mécanique à la KU Leuven. « Cette nouvelle génération est plus flexible, plus mobile et plus autonome, et n’est liée à aucune forme de clôture. Elle dépasse les frontières et les limites de l’espace de travail des robots industriels standard et de l’automatisation.

Ce qui implique un contact plus direct entre l’homme et le cobot dans l’atelier. Il peut s’agir de travailler ensemble sur des processus distincts et des éléments de travail distincts, ou de travailler simultanément sur le même processus et même élément de travail, selon un ordre séquentiel ou de manière interactive. Pensez à la palettisation, à la préparation des commandes dans l’e-commerce ou aux assemblages où les robots transmettent les pièces et les composants à l’homme. Les cobots deviennent des collègues », constate-t-elle.

Réfléchir à la sécurité dans l’atelier n’est donc pas un luxe superflu. « Maintenir le niveau de sécurité à jour avec les développements technologiques est déjà un défi. À cela s’ajoutent les risques psychosociaux que comportent ces types de collègues automatisés. Élargir la vision des risques de la sécurité est l’objectif de mes recherches. »

Impact sur l’éventail des tâches 
Aujourd’hui, une nouvelle préoccupation émerge : quel est l’impact de l’introduction des robots collaboratifs sur la qualité intrinsèque du travail des opérateurs ? L’absence de recherches fondées sur la pratique empêche de bien comprendre l’impact de la robotisation sur la qualité du travail. Pour remédier à cela, Berx et ses collègues ont réalisé une étude de cas sur la qualité du travail et le robot mobile autonome (AMR). Dans cette étude, ils examinent la manière dont le travail est organisé lors de l’introduction de nouvelles technologies.

« Les AMR peuvent se déplacer librement dans l’espace opérationnel et s’adapter à l’environnement. Les fournisseurs d’AMR promettent souvent aux entreprises des gains de productivité ou d’efficacité. Certains prétendent même contribuer à l’amélioration des compétences ou aux économies de personnel. Ce faisant, ils suggèrent que les AMR peuvent atteindre leur objectif eux-mêmes. Mais le risque est que les AMR ne répondent pas aux attentes sur le terrain et que les entreprises accordent peu ou pas d’attention à l’impact du ‘choix organisationnel’ : quelles tâches allez-vous confier à l’homme et quelles tâches seront prises en charge par la technologie ? »

Quel impact dans la pratique?  
L’étude montre que les AMR ont entraîné peu de changements dans l’éventail des tâches. La nécessité de prélever, d’emballer, de réapprovisionner et de contrôler le processus est restée intacte. Avec les AMR, le ‘processus à cycle unique’ est toutefois abandonné au profit d’une séparation de la préparation des commandes et de l’emballage. Les superviseurs devaient également faire plus de surveillance, ce qui rendait la fonction plus difficile sur les plans mental et cognitif. » Les choses étaient différentes avec la qualité du travail. Les opérateurs ayant une plus grande expérience en AMR ont signalé une plus grande monotonie du travail.

« Le travail n’était pas assez varié. Parfois, il fallait emballer toute la journée », ont-ils déclaré en écho. Un effet négatif est également apparu entre le travail avec les AMR et le degré d’autonomie. La répartition entre les tâches de préparation et d’emballage a peut-être réduit la liberté des opérateurs de travailler à leur manière. Les AMR n’ont eu aucun effet à long terme sur la charge cognitive des opérateurs. Ils ont dû s’habituer aux cobots et apprendre à interagir, par exemple en utilisant l’écran tactile et en détectant la manière dont les AMR se déplacent. Aucune conclusion claire n’a pu être formulée quant à la crainte de perdre le contact avec les collègues.

Une implémentation réfléchie 
Aux Etats-Unis, on a beaucoup parlé de la manière dont l’introduction de robots dans le processus logistique d’Amazon a augmenté la charge de travail, affectant à la fois la sécurité et la santé mentale des travailleurs. Une analyse montre que si l’introduction des robots a entraîné une diminution des blessures graves, le nombre de blessures moins graves a parallèlement augmenté. Les analystes attribuent cela à une moindre variation des tâches, d’une part, et à une charge de travail plus élevée imposée aux opérateurs, d’autre part.

« Il reste encore du travail à faire à l’échelle mondiale et il est nécessaire d’avoir des connaissances supplémentaires sur la répartition des tâches entre les humains et les cobots », conclut Berx. « C’est certainement le cas lorsque la répartition des tâches est envisagée sous l’angle économique (augmentation de la productivité) mais aussi du point de vue du bien-être des opérateurs. L’introduction de cobots nécessite une redistribution réfléchie des tâches et des responsabilités correspondantes. Ce n’est qu’ainsi que la collaboration avec les cobots peut être bénéfique pour la qualité du travail. »