Les matériaux amorphes s’auto-organisent

Des chercheurs ont mis en évidence un phénomène inédit : en activant des moteurs moléculaires à l’aide de la lumière, il est possible de transformer une matière amorphe, sans forme ni fonction, en une matière structurée à l’échelle du nanomètre.

Mots clés: #amorphe, #matériaux, #moléculaire, #moteur

Lire plus

research

( Photo: © Benjamin Large & Nicolas Giuseppone )

ENGINEERINGNET.BE - Une découverte des professeurs Nicolas Giuseppone, Institut Charles Sadron (ICS, CNRS), Jean-Marie Lehn, Institut de Science et d’ingénierie supramoléculaires (ISIS, CNRS/Unistra), et leurs collaborateurs ouvre la voie à une nouvelle génération de matériaux, capables de s’auto- organiser, de s’auto-réparer et de s’adapter à la demande.

Dans les cellules vivantes, il existe des moteurs biologiques, véritables machines moléculaires, qui participent à l’organisation de réseaux polymères complexes. Les scientifiques ont réussi à mimer ce phénomène à l’aide de simples moteurs rotatifs moléculaires artificiels capables de se regrouper à l’interface air-eau.

Une fois comprimés, ces moteurs forment un film moléculaire non structuré. Et c’est sous l’effet de la lumière que la magie opère : les moteurs se mettent en mouvement et déclenchent une organization spontanée de la matière.

Ce changement s’explique par un processus actif de polymérisation supramoléculaire : les moteurs, en tournant, sortent le matériau d’un état désordonné, dit « piégé cinétiquement », pour l’amener vers une organisation hautement structurée.

« C’est un peu comme si un moteur de voiture, via sa rotation, entraînait toute une chaîne de transformations moléculaires », explique Nicolas Giuseppone.

Résultat : des fibres longues et parfaitement organisées à l’échelle du nanomètre se forment spontanément, alors qu’aucune propriété particulière n’était observable au départ.

Autre atout de ces systèmes : leur capacité d’auto-réparation. Si le matériau est endommagé, il redevient amorphe. Mais sous l’effet d’une nouvelle impulsion lumineuse, il peut se réorganiser à l’identique, comme s’il “se souvenait” de sa forme.

Avec la perspective d’une matière active capable de s’auto-organiser, de s’auto-réparer mais aussi d’évoluer, en réponse à une modification de son environnement, cette découverte amorce une révolution dans la conception de matériaux motorisés innovants.

Cette étude a été financée par le réseau de formation innovante (ITN) « ArtMoMa » du programme H2020 de la commission européenne, permettant le financement pendant quatre ans de quinze doctorants à travers différents laboratoires européens.