Créer des objets qui valent la peine d’être créés

Pour sa dixième édition, Maker Faire Rome 2022 n’a pas uniquement prévu une série de conférences, d’ateliers, de débats et de diverses sessions de mise en relation. L’événement est et reste une foire géante.

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In the field

( Photo: LDS )

ENGINEERINGNET.BE - A cet événement des bus entiers d’étudiants et de familles débarquent pour s’immerger dans les nouvelles technologies présentées par plus de 300 exposants. C’est ce que nous avons pu constater début octobre sur le célèbre site industriel du Gazomètre d’Ostiense. Le salon a attiré 45.000 visiteurs sur trois jours. Petit tour d’horizon des technologies exposées.

Les quatre membres de ‘l’exo-team’ à l’ITI F.Severi (Padoue) ont présenté leur premier prototype d’exosquelette, une orthèse de jambe, qui leur a permis de remporter en mai le premier prix des Olympic Robotics à Gênes. Cet été, ils ont construit un second prototype. Les différences sont spectaculaires. Le premier était en aluminium et pesait 15 kg.

MaCh3D rapproche les appareils d’essai et de mesure des équipements de fabrication par impression 3D et les connecte grâce au cloud. (Photo LDS)

Le second, en PLA, ne pèse plus que 3,5 kg et intègre des moteurs aussi puissants mais moins gênants au niveau de la hanche et du genou. L’orthèse offre plusieurs modes : mouvement libre, un mode apprentissage automatique et un mode apprentissage/données. Dans ce dernier mode, l’orthèse peut être fixée à l’autre jambe encore valide et enregistrer des ‘données de marche’.

Aujourd’hui, l’orthèse assiste le patient dans ses déplacements. « Avec prudence et sous surveillance. » L’équipe rêve de créer une petite entreprise. « Nous avons besoin de médecins et de patients, mais aussi d’argent. Non, en fait, tout cela ne coûte pas si cher. Hors assemblage, l’appareil ne coûte que 1.000 à 2.000 euros en matériaux. »

Des étudiants de l’institut technique secondaire à Nyíregyháza en Hongrie ont mis au point une exo-main qui peut aider des patients en cours de revalidation après un AVC. Ils ont intégré dans le gant des petits servomoteurs qui pilotent l’orthèse et des minileviers imprimés en 3D pour commander les doigts.

Un spécialiste assure la conception et l’apprentissage des mouvements de la HandExo. L’application fonctionne via Bluetooth et un smartphone. Encore au stade de prototype, la HandExo pourrait un jour être proposée selon une formule d’abonnement.

Impression 3D 
« Nous sortons les appareils d’essai et de mesure du laboratoire de qualité pour les rapprocher des ateliers de production 3D », dit Matteo Vettori, CEO de MaCh3D. Il a mis au point un petit appareil assez simple (15 kg) dédié aux essais de traction et de flexion sur des éprouvettes de matériaux imprimés en 3D.

L’entreprise a fait breveter la forme particulière de ses éprouvettes et avec sa machine d’essai qui peut atteindre 500 kN, elle concurrence les gros fabricants. « L’an prochain, nous lancerons une plateforme en nuage qui connecte l’appareil d’essai à des machines de production. Nous anonymisons les données et grâce à l’IA, nous allons optimiser le matériel et en fin de compte le produit. »

A Ravenne, WASP fabrique des imprimantes 3D depuis une décennie. Certaines impriment avec de l’argile. D’autres construisent une maison avec du mortier et du ciment. Elles ont alors une portée de 8 m. Auparavant, la grande machine était alimentée à partir d’un réservoir. Bientôt, l’imprimante sera raccordée à une alimentation continue. L’entreprise présentera sa nouvelle gamme mi-novembre au salon Formnext à Francfort.

EveryBotics apprend à un cobot à servir parfaitement un verre de bière. (Photo LDS)

Robots 
Un petit robot déambule dans une allée derrière un jeune homme. L’appareil est basé sur une carte Arduino, une caméra Pixy et un servomoteur et est programmé en Micro Python. Cette fois-ci, le robot a suivi la couleur du pull du jeune homme « mais avec la vision par ordinateur, on peut aussi lui apprendre d’autres caractéristiques. Nous améliorons actuellement ce prototype avec la reconnaissance faciale et le pilotage par gestes », ont 
indiqué les étudiants de l’institut Almieri Rampone Polo (Benevento). Ils utiliseront le système Amazon Alexa Skills. Le visage à suivre doit alors être intégré dans la base de données AWS … 

« Nous devons faire baisser le prix des cobots », dit Quiseppe Gillini, cofondateur et CTO d’EveryBotics, une spin-off du Robotics Research Group de la DIEI à l’université de Cassino et du Latium Sud. Aujourd’hui, l’entreprise utilise une tablette pour piloter un micro-robot canadien Kinova doté de pinces mais elle veut intégrer des cobots à d’autres systèmes de pilotage.

Elle travaille sur la reconnaissance vocale, avec par exemple le système Alexa d’Amazon. « Ce marché manque de concurrence parce que c’est ‘trop cher’. Il n’existe pas de kit à faible coût. » EveryBotics souhaite intégrer un cobot dans le fonctionnement d’un ‘bar’, « non pas pour remplacer le barman mais au contraire pour collaborer avec lui afin de servir parfaitement un verre de bière, par exemple. »

La technologie à ultrasons brevetée par Yeastime accélère de 30% le processus de fermentation pour les brasseurs et favorise aussi la croissance des algues. (Photo LDS)

Brasseur 
Les trois cofondateurs de Yeastime travaillent depuis trois ans sur leur technologie à ultrasons brevetée qui doit accélérer de 30% le processus de fermentation de la bière. La levure transforme le sucre en CO2 et en éthanol. Comme le CO2 ralentit le processus métabolique de la levure, le procédé à ultrasons de Yeastime vise à éliminer le CO2 à une fréquence précise.

Ainsi, la levure peut atteindre plus facilement ses nutriments, ce qui accélère la fermentation. Créée l’an dernier, l’entreprise bénéficie d’un programme accélérateur de Plug and Play et est également active dans le programme européen EIT. « Nous allons agrandir notre cuve prototype de 30 l à 2.000 l. Notre technologie n’est d’ailleurs pas limitée au brassage de la bière.

Nous nous intéressons aussi au secteur pharmaceutique », explique Federico Ortenzi, biotechnicien et CSO. Il effectue son doctorat sur ce processus mais plutôt pour les micro-algues. « Elles peuvent ensuite servir pour la production de biocarburant par exemple. Le principal défi, c’est d’être pluridisciplinaire et de réunir des gens d’horizons différents autour du même problème pour développer une approche holistique sous différents angles : l’effet synergétique entre la composition de l’onde ultrasonore et les micro-organismes. »

Arbre hybride 
« Nous espérons trouver ici des partenaires scientifiques et financiers », a déclaré Leonardo Camarca (28), fondateur et CEO d’Agritech Futura. Partant du constat qu’on arrache sept fois plus d’arbres qu’on n’en plante, la start-up a cherché un moyen d’atténuer une catastrophe écologique. Dans cette optique, elle a mis au point son arbre hybride AEON. « L’idée est de greffer des branches d’arbre sur des troncs artificiels en polymères. » Un véritable défi : comment garantir la bioreconnaissance pour que la branche accepte de pousser ? 

Ceci nécessite des techniques de micro-irrigation. Et bien d’autres choses ... Des études menées cet été ont déjà montré que des cultures de cellules peuvent survivre sur les matériaux imprimés en 3D en PETG et en PVDF. Camarca affirme qu’en dix ans, l’arbre hybride peut absorber 1,5 fois plus de CO2 contenu dans l’air que des jeunes arbres …

Conférence d’ouverture 
Lors de la conférence d’ouverture, nous avons notamment pu entendre Tony Fadell, concepteur de l’iPod et de l’iPhone mais aussi du thermostat Nest et actuel patron de Future Shape. Ce fonds d’investissement a dans son portefeuille quelque 200 entreprises de ‘deep technology’ désireuses de résoudre des problèmes mondiaux. Il veut inspirer les créateurs à créer des choses qui valent la peine d’être créées. Objectif : sauver le monde. « Nous traversons une crise existentielle avec le changement climatique. 

Chaque secteur y a contribué. Nous devrons donc réinventer chaque secteur pour maintenir l’être humain en vie sur la planète. Il entrevoit d’énormes opportunités pour les technologies qui peuvent être durables et résoudre de véritables problèmes. Pour plusieurs raisons, il qualifie le metaverse de ‘stupid idea’. En réalité, cela ne ferait que créer des problèmes.

« Si les gens ne se connectent pas vraiment avec d’autres gens, cela développe une ‘toxicité’. » Il fait aussi référence à Twitter, Instagram … « L’esclavagisme numérique existe vraiment. Nous devons fournir aux gens les outils pour surveiller leur comportement numérique, pour nous sensibiliser aux problèmes que cela génère, les traiter et les corriger. » (Photo Maker Faire Rome)

Maîtriser ses doigts 
Michaela Gallucci a conçu un gant doté de capteurs flexibles dans les doigts, ce qui permet de saisir du texte sur un ordinateur par liaison sans fil (Bluetooth) et sans clavier. « J’avais vu ce genre de choses dans un film de science-fiction et j’ai décidé de le créer réellement. » Elle a regroupé les lettres par groupes de quatre et le pouce bascule entre les quatre groupes.

Les lettres les plus utilisées sont le plus facilement accessibles. Pour les caractères moins utilisés, il faut passer par sept étapes. Le défi n’est pas tant sur le plan technique que sur le plan opérationnel. « Le processeur enregistre un éventuel mouvement toutes les demi-secondes. Il faut s’habituer à cette vitesse spécifique. » L’essentiel est donc de maîtriser ses doigts. (Photo LDS)