ENGINEERINGNET.BE - «Ce qui passe par la cheminée, ce sont soit des débits élevés avec de faibles concentrations, soit des débits faibles avec des concentrations élevées. Les premiers sont envoyés sur du charbon actif. Les seconds sont traités aux oxydants », explique Ruben Vancalbergh (38 ans), co-fondateur de L-inc, qui a débuté en mai 2020 dans un ‘garage’ à Waregem.
« Nous voulons être leader sur le marché des oxydants et du procédé thermique. » Cet ingénieur industriel, qui a conçu et construit le quatrième four de réactivation pour le recyclage du charbon actif saturé, pour Desotec à Roeselare, pointe dans le même temps vers ses collègues Jan Van de Velde (expert en techniques de mesure et de contrôle, vannes d’arrêt et de régulation …) et Martin Kerschbaumer, qui a fait ses armes dans la maintenance et la mise en service d'installations de brûleurs.
Séchage des boues, neutralisation des munitions
Cette start-up peut déjà se targuer de quelques références. L-inc a développé, pour le compte de l'autrichien Andritz, le brûleur qui génère de l'air chaud pour sécher les boues. L-inc a mené une étude CFD pour déterminer la température, le mélange et le débit garantissant des puissances atteintes avec une température de sortie homogène. Elle a mis au point une double lance d'une capacité centrale de 900 m³/h de biogaz (6,6 MW) et d'environ 600 m³/h de gaz naturel (6,6 MW).
« S'il y a une baisse du pouvoir calorifique du biogaz, nous la compensons avec le brûleur pilote en continu », explique Vancalbergh. Un scanner de flamme mesure les rayonnements UV et IR. Ce scanner apparaît comme crucial. En effet, le processus de séchage nécessite une température homogène de 650 °C, mais pas plus, sinon il se produit une pyrolyse.
Pour un leader européen du marché de la neutralisation des munitions mettant en place une installation traitant les munitions de guerre anciennes (dont le gaz moutarde) à Poelkapelle pour l'armée belge, il est chargé du traitement du gaz en aval de la chambre de détonation. « Le gaz est oxydé dans un comburant avec un réacteur sélectif non catalytique (SNCR) pour éviter la formation de NOx. Nous injectons de l’ammoniac à 950 °C dans la pièce afin que les NOx soient réduits en eau et en azote. »
Des gens pour la croissance
En 2022, L-inc désire obtenir la certification ISO 9001 de son procédé. Fin 2022, elle envisage six, puis en 2023, huit ou neuf collaborateurs. Le grand défi sera toutefois de trouver les gens, anticipe Vancalbergh. « Les pistes et les projets sont là. » Chez nous, elle étudie pour une entreprise de traitement de déchets le remplacement d'un système de brumisation de fioul par une brumisation ultrasonique de déchets liquides. « Cela devrait assurer une combustion plus propre et moins d'usure. » L-inc vise l'amélioration des processus ou l'application d'une nouvelle ingénierie dans des projets existants de friches industrielles.
Bentonite
‘Never waste a good crisis’ est la devise de l’ingénieur chimiste Glenn Heernaert (46) de TerraCorrect. Pendant le confinement, il a mis au point un procédé pour déshydrater les boues bentonitiques. Il veut ainsi exploiter un marché qui représente, en Flandre seule, environ 150 à 600.000 tonnes par an et ne peut que croître car de moins en moins de travail se fait en tranchée ouverte. « Dans un centre-ville comme Bruges, les nouveaux câbles électriques ne peuvent être installés que par forage dirigé. »
La bentonite est une argile extraite naturellement. Dans le cas de forages dirigés, elle est utilisée pour maintenir le trou ouvert. Elle agit également comme lubrifiant lors de la traction ultérieure de la canalisation à travers le trou de forage. Lors de la traction de la canalisation, la boue bentonitique est simultanément libérée. Elle est récupérée ou envoyée vers une centrale de traitement. « Le problème, c'est qu'ensuite, il y a peu ou pas d'autres utilisations de celle-ci. La bentonite, d'abord mise en suspension, ne se décante, en outre, que très lentement. »
Les techniques de traitement classiques sont la déshydratation gravitaire et éventuellement le dessablage. Non seulement les bassins dans lesquels cela se produit nécessitent une grande surface. Il faut aussi des mois avant que le matériau puisse être déshydraté et réutilisé dans des applications souvent de faible valeur.
Précipiter les boues en quelques minutes
La solution TerraCorrect est un mélange de substances chimiques (Bentoflock 2) qui est ajouté à la boue de bentonite, après quoi l'eau liée est presque immédiatement libérée de la matière solide et est chassée de celle-ci sans trop de consommation d'énergie. En à peine quelques minutes, la boue se précipite sous forme d’une galette solide. Heernaert utilise des produits chimiques biodégradables à des doses extrêmement faibles. Son procédé a été enregistré et il fait des démarches en vue d'un brevet.
Aujourd'hui, la déshydratation se fait encore dans des centres de traitement. « Plus tard, ce sera peut-être possible avec une installation mobile sur chantier, afin de réutiliser l'eau sur place. Nous pensons aussi à la revalorisation de la bentonite et à sa réutilisation en agriculture ou dans les centrales à béton. » La bentonite récupérée retient l'eau à la manière de l'argile. En appliquant ce principe à l'agriculture, cela peut aider à apporter une réponse au problème de sécheresse. Les études indiquent une réduction de 20 à 30% de la consommation d'eau. Les flux sablonneux peuvent aussi être proposés comme solution de haute qualité dans les centrales à béton.
« Avec ce procédé, nous cherchons déjà plus loin et effectuons des tests sur d'autres flux de boues industrielles, tels que les déchets de coulis et les boues de parois Soilmix. Si l'on parvient à ralentir l'effet durcissant du ciment, 50 à 60% de l'eau peut aussi être récupérée ici et réutilisée durablement. » Dans la construction, les eaux grises pourraient donc être réintroduites dans la chaîne.
Matériau propre
Les produits chimiques utilisés réagissent complètement. « La galette de ‘bentonite et terre’ est essentiellement un matériau ‘propre’. Il relève de la réglementation du terrassement et est vendu avec une garantie de qualité. S'il est contaminé, il est également asséché ici d'abord. De cette façon, le coût du traitement peut être considérablement réduit. » Heernaert a travaillé dans un centre d'assainissement des sols pendant vingt ans.
Depuis l'été 2021, il consacre tout son temps à TerraCorrect, qui emploie désormais quatre personnes. L'entreprise propose des solutions respectueuses de l'environnement dans divers secteurs et réalise ses propres développements. « Le VLAIO accepte de nous aider. » La Flandre, c’est petit. L’Europe ? Heernaert sourit : « Gardons les pieds sur terre. » Mais il est quand même à Lyon et on l'a entendu parler à des Français et des Suédois …
Solvaxers
La technologie conventionnelle de nettoyage des sols par l'injection directe de réactifs dans le sous-sol consiste à pousser une pointe conique dans le sol pour ensuite injecter le produit. Cependant, cette technique de ‘poussée directe’ compacte le fond, nécessitant une pression toujours plus grande à mesure que l’on pénètre plus profondément. Souvent, cette pression est supérieure à la pression de fractionnement, ce qui provoque une ‘cassure’ du sol.
Il se crée alors des’canaux’ le long desquels le produit injecté se répand de façon incontrôlée. Pour descendre encore plus, on martèle. Les vibrations engendre un risque de ‘reflux’. Le produit injecté sous pression remonte alors dans le puits de forage et est perdu. Injectis (Gavere) a développé il y a six ans sa propre technologie de dépollution in-situ des sols et des eaux souterraines. Son fondateur et PDG, Jeroen Vandenbruwane, l'appelle la ‘technologie du tire-bouchon’.
« Nous enfonçons une tête spiralée dans le sol. Sur la tête et le long du tire-bouchon, les réactifs peuvent alors être introduits dans le sol à une pression beaucoup plus faible que la pression conventionnelle, avec une grande certitude que le produit se retrouvera à la profondeur souhaitée ou dans la couche de sol souhaitée. La tête d'injection est également associée à des équipements de mesure et de contrôle pour réguler la pression d'injection en fonction de la profondeur, de la composition du sol, de la nappe phréatique … ce qui assure un fonctionnement maîtrisé et surveillé. » Ce SPIN d'Injectis a déjà été breveté en Belgique et aux États-Unis. L’Europe suit.
Utilisation plus efficace
« Nous sommes légèrement plus chers », admet Vandenbruwane, « mais sur l’ensemble d'un projet, une utilisation plus efficace des produits permet d’économiser certains coûts. Pas besoin, en effet, de mettre de l'argent dans le sol là où ce n'est pas nécessaire. Pas besoin non plus de revenir pour ‘refaire’ un site. » C’est d’autant plus avantageux que la superficie et le volume (de sol) sont grands et que le sol à traiter est hétérogène. Tout ceci ressort d’une pré-étude. Injectis, qui compte actuellement sept salariés, utilise sa propre technologie et réalise également les travaux.
Elle injecte chaque type de produit (oxydants chimiques, acides, bases, sels, sources de carbone …) indépendamment du fournisseur. « Le secteur a été mis à l’arrêt pendant deux mois en raison de la pandémie. Mais l’activité a repris depuis. Nous travaillons aussi beaucoup à l’export. L’an passé nous avons connu une croissance de 25%. Cette année nous allons probablement doubler le chiffre d’affaires de 2020.
Le coronavirus semble n’avoir pas eu d’impact négatif. Les projets sont désormais accélérés. » Les clients sont des propriétaires, des développeurs, des bureaux d'études et des entrepreneurs. « Nous continuons notre développement, mais il s'agit principalement de commercialiser notre technologie », déclare Vandenbruwane. « Il faut que nous passions rapidement à l'échelle européenne, que notre savoir-faire soit encore plus crédible, grâce par exemple à une garantie de résultats, mais aussi à un modèle 3D du sol traité. »